La condition suspensive

La condition est suspensive « lorsque son accomplissement rend l’obligation pure et simple. » (Art.1304§2) Il pourra par exemple s’agir d’une clause conditionnant l’achat d’un immeuble à l’obtention d’un prêt.

L’existence de l’obligation sous condition suspensive

En principe, une obligation sous condition suspensive est réputée ne pas exister. Cela implique que, si le débiteur paie cette obligation, il pourra demander la restitution du paiement (Art. 1304-5§21), que la défaillance de la condition rétroagit (Art.1304-6§3) ou encore que la prescription ne court pas (Art.2233,1°).

Toutefois, « le débiteur doit s’abstenir de tout acte qui empêcherait la bonne exécution de l’obligation; le créancier peut accomplir tout acte conservatoire et attaquer les actes du débiteur accomplis en fraude de ses droits » (Art.1304-5§1).

La durée de la condition

L’ancien article 1176 prévoyait que « S’il n’y a point de temps fixe, la condition peut toujours être accomplie ; et elle n’est censée défaillie que lorsqu’il est devenu certain que l’événement n’arrivera pas ». Ce principe a été remis en question par l’arrêt du 20 mai 2015 (Civ.3, n°14-11.851) jugeant que « la stipulation d’une condition suspensive sans terme fixe ne peut pour autant conférer à l’obligation un caractère perpétuel » et que les parties avaient implicitement fixé un délai raisonnable.

L’article 1176 a été supprimé et n’a pas été remplacé. La solution est donc incertaine.

La réalisation de la condition

Lorsque la condition suspensive se réalise, l’obligation devient pure et simple. Avant la réforme, cet effet était en principe rétroactif « au jour auquel l’engagement a été contracté. » (Art.1179 anc.) Le nouvel article 1304-6§1 prévoit le contraire : l’obligation « devient pure et simple à compter de l’accomplissement de la condition suspensive ».

Cette règle est supplétive, mais, même si une clause prévoit la rétroactivité, « La chose, objet de l’obligation, n’en demeure pas moins aux risques du débiteur, qui en conserve l’administration et a droit aux fruits jusqu’à l’accomplissement de la condition. » (1304-6§2).

Si l’obligation conditionnelle porte sur une chose, celle-ci reste à la charge du débiteur jusqu’à ce que la condition soit remplie. La chose reste également à son profit et il « en conserve l’administration et a droit aux fruits jusqu’à l’accomplissement de la condition. » (Art.1304-6) Cette précision est nouvelle.

Défaillance de la condition

Contrairement à la réalisation de la condition, sa défaillance est rétroactive : « En cas de défaillance de la condition suspensive, l’obligation est réputée n’avoir jamais existé » (Art.1304-6§3)2. Elle se produit lorsqu’à la fin du délai fixé (tacitement ou non), la condition n’est pas remplie ou bien si, avant cette date, il devient évident que la condition ne sera pas remplie.

La condition résolutoire

L’effet de la condition résolutoire est prévu à l’article 1304-7 :

« L’accomplissement de la condition résolutoire éteint rétroactivement l’obligation, sans remettre en cause, le cas échéant, les actes conservatoires et d’administration.

La rétroactivité n’a pas lieu si telle est la convention des parties ou si les prestations échangées ont trouvé leur utilité au fur et à mesure de l’exécution réciproque du contrat. »

La volonté et la condition

Plusieurs règles empêchent que l’avènement de la condition soit entre les mains d’un des contractants. Cela passe par un contrôle de la clause elle-même, qui ne doit pas être « potestative », et par un contrôle de son exécution.

L’interdiction des conditions purement potestatives

Les conditions purement potestatives sont interdites par l’article 1304-2 : « Est nulle l’obligation contractée sous une condition dont la réalisation dépend de la seule volonté du débiteur. Cette nullité ne peut être invoquée lorsque l’obligation a été exécutée en connaissance de cause. »

Cette interdiction ne s’étend pas aux conditions « simplement potestatives » (lorsqu’elle est déterminée à la fois par la volonté du débiteur et par des « circonstances objectives, susceptibles d’un contrôle judiciaire », Civ.1, 22 novembre 1989, n°87-19.149).

Les obligations alternatives ne sont pas potestatives. (Com., 7 décembre 2004, n°03-12.032), le débiteur ne pouvant pas choisir de ne pas être engagé.

La protection du déterminisme de la condition

L’intégrité du déterminisme des conditions suspensives et résolutoires est protégée par l’article 1304-3 (anc. art. 1178) :

« La condition suspensive est réputée accomplie si celui qui y avait intérêt en a empêché l’accomplissement.

La condition résolutoire est réputée défaillie si son accomplissement a été provoqué par la partie qui y avait intérêt. »

La seule absence de diligence peut constituer cet « empêchement ». Par exemple, s’agissant d’une condition portant sur l’obtention d’un prêt, une personne demandant sans succès un prêt non-conforme aux stipulations sera jugée avoir fait défaillir la condition, qui sera donc réputée accomplie.

1 Ancien article 1180 : « Le créancier peut, avant que la condition soit accomplie, exercer tous les actes conservatoires de son droit. »

2 C’est encore la solution inverse du droit antérieur. Avant la réforme, la défaillance de la condition entraînait la caducité du contrat (Civ.1, 7 novembre 2006, n°05-11.775) pour l’avenir (D.Actu, 5 décembre 2006).