L’application dans le temps
La directive de 1985 n’a été transposée que le 19 mai 1998, alors que le délai de transposition n’était que de 3 ans. Ainsi, pour les litiges relatifs à des produits mis en circulation entre le 30 juillet 1988 et le 22 mai 1998, la directive est appliquée directement par les juridictions nationales, qui déclarent alors interpréter le droit « à la lumière de la directive ». Toutefois, cela ne permet pas au juge de contredire des lois impératives (CJUE 4 juillet 2006, Adeneler, C-212/04), dont les règles de prescriptions (Civ.1, 16 novembre 2016, n°15-26.018).
La loi de transposition est applicable « aux produits dont la mise en circulation est postérieure à la date d’entrée en vigueur de la présente loi, même s’ils ont fait l’objet d’un contrat antérieur. »
Un régime exclusif limité
La CJUE a clairement posé dans la décision Gonzalez Sanchez de la CJUE du 24 avril 2002 (n° C-183/00) que la directive était impérative : elle ne laisse pas aux États membres la possibilité de prévoir d’autres solutions sur son champ d’application. Toute action entrant dans son champ d’application doit être fondée sur ce régime. Reste à définir ce champ. La Cour, reprise par l’article 1245-17, précise que la directive « n’exclut pas l’application d’autres régimes de responsabilité contractuelle ou extracontractuelle reposant sur des fondements différents, tels que la garantie des vices cachés ou la faute. » (§31)
Il a été clairement affirmé que la faute imputée devait être « distincte du défaut de sécurité du produit » (Com., 26 mai 2010, n°08-18.545 ; Civ.1, 17 mars 2016, n°13-18.876).
Il n’y a pas encore eu de systématisation du champ d’application du régime. Le champ d’exclusivité de ce dernier suppose trois choses :
- une action consistant à reprocher un dommage indemnisable sur le fondement du présent régime (CJUE, 4 juin 2009, Moteurs Leroy Somer, n°C-285/08 ) …
- … causée par la défectuosité d’un produit …
- … contre son producteur ou autre personne responsable prévue ou exclue par le présent régime (CJUE 10 janv. 2006, n°C-402/03, Bilka et Skov).
Cela laisse notamment ouvertes les actions portant sur un dommage causé au produit lui-même, qui peut être indemnisé sur le fondement régime de la garantie des vices cachés (RTD Civ. 2016 p.137), de l’obligation de sécurité ou autre. (Malaurie et al., p179)
Actualité
Civ.1, 17 mars 2016, n°13-18.876 : Une personne étant tombée d’un toit à cause de la fragilité d’une plaque de fibrociment a poursuivi le propriétaire (un groupement agricole), qui a appelé en garantie son fournisseur sur le fondement de la responsabilité pour faute.
La Cour de cassation rappela que la faute ne se distinguant pas du défaut de sécurité, le régime des produits défectueux était applicable. Le producteur étant connu, la responsabilité du fournisseur ne pouvait être engagée et la demande du propriétaire a été rejetée.