Le dol

Le dol est défini par l’article 1137 du code civil:

« Le dol est le fait pour un contractant d’obtenir le consentement de l’autre par des manœuvres ou des mensonges.

Constitue également un dol la dissimulation intentionnelle par l’un des contractants d’une information dont il sait le caractère déterminant pour l’autre partie. »

On peut dégager de la définition du dol trois éléments :

  • la provocation intentionnelle de l’erreur du cocontractant de manière active (manœuvres et mensonges) ou passive (réticence dolosive)
  • la nature déterminante de l’erreur (Art.1129) connue par la partie à l’origine de l’erreur (Art.1137)
  • le cocontractant, son représentant, gérant d’affaires, préposé, porte-fort ou un tiers de connivence doit en être à l’origine. (Art.1138)

La méprise « sur la valeur de la prestation ou sur un simple motif du contrat » est une cause de nullité et « l‘erreur qui résulte d’un dol est toujours excusable » (Art.1139). Le dol n’a pas besoin de porter, comme l’article 1132 l’exige pour l’erreur, sur les qualités essentielles du contrat.

La réticence dolosive est « la dissimulation intentionnelle par l’un des contractants d’une information dont il sait le caractère déterminant pour l’autre partie » (Art.1137). Depuis l’arrêt Baldus (Civ.1, 3 mai 2000, n°98-11.381), il est constant qu’en l’absence d’obligation d’information, il n’y a pas de réticence dolosive et qu’une telle obligation ne pèse pas sur l’acheteur, même professionnel, sauf s’il possédait des informations déterminantes que le vendeur ne pouvait pas connaître.

La réticence dolosive prévue à l’article 1137 et l’obligation d’information prévue à l’article 1112-1 sont très proches. Voici un résumé de leurs différences :


Art.1112-1Art.1137
Informations retenues« une information dont l’importance est déterminante pour le consentement de l’autre » (§1) + « Ont une importance déterminante les informations qui ont un lien direct et nécessaire avec le contenu du contrat ou la qualité des parties » (§3)« information dont il sait le caractère déterminant pour l’autre partie »
Nature de l’erreur efficaceLégitimeEst toujours excusable
Exclusion des informations sur la valeurOui (§2)Non
Connaissance du caractère déterminant pour le cocontractantNon nécessaire ?Nécessaire
SanctionsD&ID&I et/ou nullité relative

Actualité

Civ.3, 7 avril 2016, n°14-24.164 : Une SCI avait confié la commercialisation de ses appartements à la société Omnium Conseil, qui démarcha les époux X. Une plaquette publicitaire de la SCI alléguait une forte demande locative et un placement sûr et rentable à court terme et que l’immeuble leur avait été vendu à un prix qui dépassait de 30 à 50 % sa valeur réelle. Les sociétés Omnium Finance et Omnium Conseil partirent de cette estimation pour faire une étude financière personnalisée aux époux X et leur avaient remis un dossier destiné à leur faire croire que leur investissement était avantageux et sans aucun risque. Convaincus, les époux X achetèrent le bien.

Toutefois, le marché immobilier en question était en fait saturé au moment de l’achat et les époux X n’ont jamais réussi à louer leur appartement. Ils ont donc assigné les trois entreprises en nullité de la vente. La Cour d’appel, relevant que les affirmations mensongères allaient bien au-delà de la simple exagération publicitaire, annula les contrats. La Cour de cassation confirma.

La violence

La violence est définie par l’article 1140 :

« Il y a violence lorsqu’une partie s’engage sous la pression d’une contrainte qui lui inspire la crainte d’exposer sa personne, sa fortune ou celles de ses proches à un mal considérable. »

On en dégage deux conditions en plus de la nature déterminante du vice :

  • Une contrainte illégitime
  • La crainte de l’exposition à un mal considérable

La violence est une cause de nullité même si elle a été exercée par un tiers. (Art. 1142)

La violence a « fait peau neuve »1 avec la réforme de 2016 :

  • La violence envers tous les proches est prise en compte, quand l’ancien article 1113 la limitait à l’époux ou l’épouse, ses ascendants et ses descendants.
  • L’ancien article 1114, interdisant que la seule crainte révérencielle vis-à-vis de ses parents soit une forme de violence, a disparu.
  • La consécration de l’utilisation d’une voie de droit ou de sa menace comme forme de violence « lorsque la voie de droit est détournée de son but ou lorsqu’elle est invoquée ou exercée pour obtenir un avantage manifestement excessif. » (Art.1141)
  1. La dépendance

L’article 1143 consacre l’état de nécessité et la dépendance économique comme formes de violence : «Il y a également violence lorsqu’une partie, abusant de l’état de dépendance dans lequel se trouve son cocontractant, obtient de lui un engagement qu’il n’aurait pas souscrit en l’absence d’une telle contrainte et en tire un avantage manifestement excessif. »

Il y a débat sur le fait que cette forme de violence s’ajoute à celle de l’article 1140 ou en soit une espèce. Dans le second cas, les conditions des articles 1143 et 1140 seraient cumulatives (Barbier H., JCP G 2016, n°15, p.421). Concentrons-nous sur les conditions dégagées par l’article 1143 :

  • un état de dépendance de la partie lésée …
  • … dont l’autre partie tire un avantage manifestement excessif …
  • … ayant déterminé l’engagement du contractant lésé.

Ce principe avait déjà été élaboré par la jurisprudence (Civ.1, 30 mai 2000 n°98-15.242 ; Civ.1, 3 avril 2002, n°00-12.932, Bordas), mais n’a toujours pas trouvé application (Claudel E., RTD Com. 2016.460).

La sanction de la violence ou du dol

La violence et le dol sont des délits civils : ils engagent la responsabilité de leur auteur. La personne dont le consentement a été vicié a le choix entre annuler le contrat ou le laisser subsister. Le préjudice indemnisé ne sera pas le même dans les deux cas.

L’hypothèse où le contrat subsiste a été abordée par les arrêts « Parsys ». Dans le premier arrêt (Com., 25 mars 2010, Parsys 1, n°09-12.895), la Cour de cassation a jugé qu’il est possible d’indemniser « la perte d’une chance de ne pas contracter ou de contracter à des conditions plus avantageuses ». Le second, portant sur le même litige (Com., 10 juillet 2012, Parsys 2, n°11-21.954), a posé qu’il n’était en fait possible d’indemniser que la perte de chance « de contracter à des conditions plus avantageuses ». Un troisième arrêt revint à la solution de Parsys 1 (Com. 21 juin 2016, n°14-29.874).

1 Code civil Dalloz, commentaire sous l’article 1143