La commission d’infractions pénales implique souvent que leur(s) auteur(s) doivent indemniser les victimes du dommage causé sur le fondement de la responsabilité délictuelle.
Il arrive qu’une juridiction pénale et une juridiction civile statuent sur un même litige. Se pose alors la question de savoir comment interagissent ces deux ordres de juridictions.
Pour aller plus loin :
- Malaurie et al., p.140
Cette partie s’inscrit dans la partie sur les règles générales du droit des obligations de notre manuel de droit des obligations.
« Le criminel tient le civil en l’état »
Lorsque une juridiction civile et une juridiction pénale sont amenées à décider sur un même litige, « il est sursis au jugement de cette action tant qu’il n’a pas été prononcé définitivement sur l’action publique lorsque celle-ci a été mise en mouvement. » (Art.4§2 CPP)
Cette règle, combinée à l’autorité de la chose jugée fait que la solution du juge pénal s’impose au juge civil. L’article 1355 précise ce point :
« L’autorité de la chose jugée n’a lieu qu’à l’égard de ce qui a fait l’objet du jugement. Il faut que la chose demandée soit la même; que la demande soit fondée sur la même cause; que la demande soit entre les mêmes parties, et formée par elles et contre elles en la même qualité. »
L’étendue de cette autorité peut poser problème : jusqu’où va-t-elle ? Une large part des difficultés résulte de la similarité entre les notions de faute civile et faute pénale1.
1 La question peut aussi se poser s’agissant du lien de causalité (pouvant être apprécié beaucoup plus souplement en droit civil qu’en droit pénal, notamment dans l’application de la responsabilité du fait des choses ou des accidents de voiture). Toutefois je ne l’ai pas vue traitée …
Arrêts:
II.La distinction entre faute civile et pénale
Si l’inculpé a été innocenté, pourra-t-il être condamné au civil ? La réponse est clairement oui si la responsabilité recherchée n’est pas fondée sur la faute, mais, par exemple, sur la garde d’une chose, d’un enfant, l’implication dans un accident, etc. (Malaurie et al., p.140)
Pour le régime de responsabilité pour faute, la solution est moins simple. Si une faute pénale est toujours une faute civile, l’inverse n’est pas toujours vrai. Les fautes civiles sont souvent définies plus largement que les fautes pénales. Une personne relaxée d’un délit peut-elle se voir reprocher, en raison des mêmes faits, une faute civile ?
S’agissant des fautes non-intentionnelles, la réponse est clairement oui. Les règles les régissant sont prévues, pour le droit pénal, à l’article 121-3 du code pénal et, pour le droit civil, à l’article 1241 du code civil. L’article 121-3 n’admet (à propos des délits non-intentionnels) que la faute simple1 ne puisse constituer l’infraction que si la personne fautive a directement contribué au dommage (§3). En cas de causalité indirecte, par contre, la faute doit être qualifiée. On distingue alors la faute délibérée (la violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement) et la faute caractérisée (qui exposait autrui à un risque d’une particulière gravité que l’auteur ne pouvait ignorer) (§4). Vous voyez, on est très loin de la faute simple de l’article 1241 : « Chacun est responsable du dommage qu’il a causé non seulement par son fait, mais encore par sa négligence ou par son imprudence. »
L’article 4-1 du CPP prévoit ce cas spécifique et permet qu’en l’absence de faute pénale non intentionnelle, la victime puisse agir afin d’obtenir la réparation d’un dommage sur le fondement de l’article 1241.
Cette solution est-elle généralisable à toutes les situations où la faute civile est définie plus largement que l’infraction pénale ? Je ne sais pas.
1« faute d’imprudence, de négligence ou de manquement à une obligation de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement »
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